Les appuis à la souveraineté se raffermissent

Un nouveau volet du sondage Pallas Data/Qc125/L’actualité, sur la souveraineté du Québec cette fois-ci, permet de constater que si les indépendantistes sont encore loin du grand soir, leur projet demeure vivant. La montée vertigineuse du Parti québécois (PQ) et la chute de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans les intentions de vote cet automne semblent avoir eu un léger effet sur l’engouement des Québécois pour le projet indépendantiste. Lire cette chronique ici . Philippe J. Fournier est le créateur de Qc125. Il est professeur de physique et d'astronomie au Cégep de Saint-Laurent à Montréal. Pour toute information ou pour une demande d'entrevue médiatique, écrivez à info@Qc125.com . Philippe J. Fournier is the creator of Qc125. He teaches physics and astronomy at Cégep de Saint-Laurent in Montreal. For information or media request, please write to info@Qc125.com .

La projection Qc125 du 22 juin 2017

Avant de prendre congé de politique (et de chiffres) pour l'été, j'ai entré dans le simulateur les derniers sondages Léger et Mainstreet afin de compiler une nouvelle projection Qc125.

D'ici la fin du mois (parce que je prendrai des vacances sous peu), je publierai en détail les projections des circonscriptions et la carte complète de la projection.

Mais d'abord, jetons un coup d'oeil aux sondages qui ont été publiés depuis janvier. Ils ont tous été considérés dans les calculs en fonction de la taille des échantillons et de la date de la prise de mesure (généralement la date au milieu de la prise de sonde). Les sondages plus anciens possèdent un poids moins important dans la pondération, évidemment.

[En guise de comparaison, il y a eu trois sondages en janvier - Léger, CROP et Mainstreet. Ensemble, ces trois sondages prennent 3,4% de la pondération totale. De leur côté, les deux sondages de juin - Léger et Mainstreet - prennent plus de 60% de la pondération.]

Voici le graphique des sondages qui ont été considérés dans le calcul de cette projection:



(Les lignes pâles représentent les projections Qc125.)

Dans les derniers billets sur les sondages Léger et Mainstreet, nous avions déterminé que les chiffres de cette nouvelle projection ne devraient pas vraiment contenir de grandes surprises, du moins pour la projection du vote populaire. Les Libéraux sont stables. La CAQ est en légère hausse et le PQ en faible baisse.

Certes, le 18% accordé à Québec solidaire dans le dernier sondage Mainstreet pourrait être considéré comme une donnée aberrante, car elle sort vraiment du peloton. Cependant, il s'agit du premier coup de sonde de Mainstreet depuis le congrès de Québec solidaire à la fin mai. Est-ce possible que QS ait moussé ses appuis après le refus de ses membres d'une convergence avec le PQ? On peut en douter, mais ce n'est pas impossible non plus. Seuls les sondages au retour de l'été pourront nous le confirmer.

Toutefois, c'est justement pour cela que le modèle est si pratique: il est construit pour «amortir» les chocs des données qui sortent de l'ordinaire. Le 18% de QS mesuré par Mainstreet ne fera que modestement bouger l'aiguille.


Sans plus tarder, voici donc la nouvelle projection Qc125!



La projection du vote populaire



Sans surprise, le Parti libéral du Québec demeure en tête des intentions de vote. La Coalition Avenir Québec conserve le deuxième rang. Le PQ glisse de quelques points et QS continue sa montée des derniers mois.

Voici les valeurs moyennes du vote populaire des 10 000 simulations de la projection:

PLQ 31,8% (-0,2% par rapport à mai 2017)
CAQ 27,3% (+0,5%)
PQ 22,5% (-1,6%)
QS 14,0% (+1,5%)
PCQ 2,2% (+0,5%)

Avec les incertitudes, voici le graphique de la projection du vote populaire (les petits chiffres indiquent les limites de l'intervalle de confiance de 95%).



[FAQ: Comment lire ce graphique? Barres foncées: un écart-type. Barres intermédiaires avec petits chiffres: 1,96 × écart-type, soit l'intervalle de confiance de 95%. Barres pâles: minimum et maximum.]

Pour le Parti libéral du Québec, c'est la routine. En effet, le PLQ oscille entre 30% et 33% dans les intentions de vote depuis plus d'un an. Il a reçu quelques petits « boosts » occasionnels au cours de la dernière année, mais son plancher semble solide à au moins 30%. Pour le vote populaire du PLQ, cette projection est le statu quo.

La Coalition Avenir Québec compte maintenant quatre sondages consécutifs (Léger et Mainstreet de mai et juin) qui le placent devant le Parti Québécois. Dans cette projection, la CAQ creuse l'écart davantage de plus de 2% par rapport au PQ. Même si la CAQ obtient en moyenne 4,5% de moins que le PLQ, celle-ci augmente ces chances de l'emporter (voir plus bas), car elle est maintenant première du vote francophone.

Pour le Parti québécois, il s'agit de la cinquième projection Qc125 consécutive où sa part du vote populaire descend (voir figure ci-dessous). Comme je l'ai écrit hier, je ne croyais pas que le PQ pouvait descendre sous la barre des 25% (son résultat de 2014), mais il semble que plusieurs électeurs jadis péquistes ont décidé d'appuyer soit la CAQ à droite ou QS à gauche. Cette diminution continue du support péquiste sur plusieurs mois et par plus d'une firme ne peut pas être un simple hasard.



De son côté, Québec solidaire continue sa montée graduelle qu'il a entreprise depuis le printemps. Il s'agit de la quatrième projection consécutive où QS augmente son vote populaire moyen. À 14% (soit le double de son résultat de 2014), QS peut espérer faire de nouveaux gains sur l'Île de Montréal.

Finalement, le Parti conservateur du Québec, qui a été introduit dans le modèle en avril dernier, grimpe quelque peu à 2,2% d'appuis. Il est à noter que malgré qu'il s'agit d'un faible pourcentage au niveau national, le PCQ est en train de brouiller les cartes dans la région de Québec. Le dernier sondage Léger lui accordait pas moins de 11% dans la Capitale nationale.



La projection de sièges



Comment ces intentions de vote se traduisent-elles en termes de circonscriptions? Évidemment, les projections de sièges sont beaucoup plus variables que les projections du vote populaire. Dans notre système uninominal, quelques fractions de points supplémentaires dans des circonscriptions clés peuvent faire toute la différence entre un gouvernement majoritaire ou minoritaire, entre une victoire ou une défaite.

Encore une fois, le PLQ est en tête de la projection de sièges, la CAQ vient deuxième et le PQ troisième. Voici les valeurs moyennes de sièges des 10 000 simulations:

PLQ 51,1 (+1,6 par rapport à mai 2017)
CAQ 43,0 (+2,3)
PQ 25,9 (-4,1)
QS 5,0 (+0,3)


[FAQ: Comment lire ce graphique? Barres foncées: un écart-type. Barres intermédiaires avec petits chiffres: 1,96 × écart-type, soit l'intervalle de confiance de 95%. Barres pâles: minimum et maximum.]

En d'autres termes, la baisse du Parti québécois profite à tous les autres partis à différents niveaux. Dans ses scénarios les plus optimistes, le Parti libéral pourrait même gagner une majorité. La CAQ est en train de s'installer partout dans le 450 et augmente significativement ses chances de gagner. Québec solidaire peut maintenant rêver de doubler son total actuel de sièges.

Voici la distribution de sièges en fonction du vote populaire. Nous pouvons remarquer que la partie supérieure de la courbe libérale dépasse le seuil des 63 sièges requis pour une majorité.




N'ajustez pas votre appareil, mais il y a aussi quelques points turquoises juste au-dessus de la ligne pointillée des 63 sièges. Certes, ces résultats sont au-delà de l'intervalle de confiance de 95%, mais nous pouvons maintenant voir à l'horizon la possibilité d'une victoire caquiste majoritaire si ce parti grimpe encore de quelques points.

Le plancher de sièges du PLQ demeure le plus élevé aux alentours de 32 à 34 sièges. Pour la CAQ, son plancher se trouve au niveau de son résultat de l'élection de 2014 (22 sièges). Pour le Parti québécois, son plancher tombe à nouveau et se situe maintenant à 9-12 sièges.



La projection du vainqueur



Parmi les 10 000 simulations de la projection, quels sont les totaux de victoires et de défaites pour chaque parti?

Voici, dans l'ordre (de gauche à droite et de bas en haut), les résultats de chacune des simulations:


Avez-vous l'oeil pour les compter?

Voici les résultats exprimés plus clairement:





Probabilités de remporter une simulation d'élection générale:

PLQ 63,2% (-5,6% par rapport à mai 2017)
CAQ 33,3% (+9,3%)
PQ   0,9% (-2,8%)
Égalité   2,6% (-0,9%)

Le PLQ remporte 63,2% des simulations, dont 6,7% avec un gouvernement majoritaire. Il s'agit d'une faible baisse pour le PLQ; le mois dernier, ses chances de l'emporter étaient de 68,8%.

La CAQ remporte maintenant 33,3% des simulations, dont 0,1% avec un gouvernement majoritaire. En mai, les probabilités de victoire de la CAQ était de 24,0%.

Les chances du PQ semblent en train de fondre comme neige au Soleil. En mai, le PQ remportait 3,7% des simulations. Cette probabilité a chuté à 0,9%. Statistiquement, nous pourrions affirmer qu'avec ces chiffres, une victoire péquiste serait une donnée aberrante.

De plus, il y a une probabilité de 2,6% d'une égalité en tête du nombre de sièges. Tous les types d'égalité entre ces partis sont possibles, mais la plus probable (2,2%) est une égalité PLQ-CAQ. Une triple égalité survient dans 0,04% des simulations.



La distribution régionale



Je publierai la carte complète de la projection dans les prochains jours, mais voici un aperçu de la distribution régionale. Les couleurs ici représentent le parti qui est le favori pour remporter chaque circonscription. Lorsque la couleur est plus pâle, c'est qu'il s'agit d'une circonscription pivot (FAQ: comtés solides, probables et pivots).



Sans surprise, le PLQ est en tête à Montréal, Laval, l'ouest de la Montérégie et Gatineau. La baisse du PQ profite au PLQ dans le Bas-Saint-Laurent et le Nord du Québec. Le PLQ est en tête dans 52 circonscriptions, dont 14 comtés pivots.

La CAQ n'est pas loin derrière avec 50 circonscriptions où elle est favorite, mais attention: parmi ces circonscriptions, on ne dénombre pas moins de 18 comtés pivots, ce qui est très élevé. Avec 27,3% d'appui, la CAQ est à l'intérieur de sa zone payante. Elle peut donc grimper de beaucoup avec quelques points de plus, mais pourrait aussi perdre plusieurs de ces pivots si elle devait redescendre au vote populaire.

La CAQ balaie la Couronne nord, Laurentides-Lanaudière et l'est de la Montérégie. De plus, elle va chercher pas moins de 14 des 16 circonscriptions de la Capitale nationale et de Chaudière-Appalaches. En plus de rafler tous les sièges du Centre du Québec, la CAQ partagerait la Mauricie avec le PLQ.

Que reste-t-il au Parti québécois? Il est en tête dans 18 circonscriptions, dont trois circonscriptions dans la moitié est de Montréal et quatre dans le 450. On ajoute à ce total la circonscription de Taschereau à Québec (comté pivot) et dix sièges dans le Bas-Saint-Laurent, le Saguenay, l'Abitibi et le Nord du Québec.

Finalement, QS continue son expansion au coeur de Montréal le long de la ligne orange du métro, en plus d'Hochelaga-Maisonneuve (qui est techniquement le long de la ligne verte).

(Cliquez pour agrandir.)






En conclusion



Nous avons vu à quelques reprises au cours des 15 dernières années d'autres partis que le PLQ et le PQ grimper dans les sondages pour ensuite les voir s'effondrer (ou diminuer dramatiquement) le temps des élections venu.

Mais ne semble-t-il pas y avoir quelque chose de différent cette fois?

Ces derniers sondages avant la saison estivale alimenteront sans doute les discussions politiques sur les terrains de camping et les plages de la province. Est-ce que le PLQ peut vraiment se maintenir à un tiers de l'électorat? Est-ce que la CAQ peut continuer de progresser dans les banlieues qui étaient jadis des châteaux forts péquistes? Le Parti québécois peut-il revenir en force à l'automne à temps pour son congrès national de septembre (où Jean-François Lisée devra faire face à un vote de confiance)?

Québec solidaire peut-il vraiment sortir de l'Île de Montréal?

Le Parti conservateur va-t-il percer dans la région de Québec et gruger des appuis au PLQ et à la CAQ?

La politique québécoise peut être frustrante selon les allégeances politiques de chacun, mais une chose est certaine: elle n'est jamais ennuyante.


Plus d'analyse de cette projection dans les prochains jours.



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