Les appuis à la souveraineté se raffermissent

Un nouveau volet du sondage Pallas Data/Qc125/L’actualité, sur la souveraineté du Québec cette fois-ci, permet de constater que si les indépendantistes sont encore loin du grand soir, leur projet demeure vivant. La montée vertigineuse du Parti québécois (PQ) et la chute de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans les intentions de vote cet automne semblent avoir eu un léger effet sur l’engouement des Québécois pour le projet indépendantiste. Lire cette chronique ici . Philippe J. Fournier est le créateur de Qc125. Il est professeur de physique et d'astronomie au Cégep de Saint-Laurent à Montréal. Pour toute information ou pour une demande d'entrevue médiatique, écrivez à info@Qc125.com . Philippe J. Fournier is the creator of Qc125. He teaches physics and astronomy at Cégep de Saint-Laurent in Montreal. For information or media request, please write to info@Qc125.com .

L'évolution du vote dans la Capitale nationale

En juin dernier, le chef péquiste Jean-François Lisée (à l'époque aspirant-chef) affirmait que son parti devait « percer le mystère Québec » s'il espérait renverser les Libéraux lors de la prochaine élection. Mis à part la circonscription de Taschereau remporté par Mme Agnès Maltais, le Parti québécois n'a remporté aucun autre comté à Québec ou ses environs en 2014.

Philippe Couillard, de son côté, sait pertinemment que son gouvernement dépend des nombreux sièges qu'il détient dans la Capitale et Chaudière-Appalaches. En effet, lorsque le PLQ a perdu des plumes à Québec en 2012, les Libéraux se sont retrouvés dans l'opposition. Parmi les 10 000 simulations de la dernière projection Qc125, aucune ne donne les Libéraux majoritaires avec une contre-performance dans la région de Québec.




La Coalition Avenir Québec (et jadis l'ADQ) performe bien au-delà de sa moyenne nationale dans la région de Québec. Si la CAQ veut continuer de grandir, et peut-être espérer remplacer le PQ comme opposition officielle, elle se doit de convaincre les électeurs entourant la Capitale.

[En créant le logiciel du simulateur, j'ai créé des régions du Québec selon leur emplacement géographique, mais aussi selon leurs habitudes électorales. Les régions de Qc125 ne sont donc pas exactement les mêmes que les régions géographiques officielles du Québec. Ici, la région de Québec et de la Capitale nationale comprend aussi des comtés de Chaudière-Appalaches, tels que Beauce-Nord et Beauce-Sud.]

Voici les seize circonscriptions en question:

  • Charlevoix–Côte-de-Beaupré
  • Chauveau 
  • La Peltrie
  • Louis-Hébert 
  • Portneuf 
  • Beauce-Nord
  • Beauce-Sud
  • Bellechasse 
  • Chutes-de-la-Chaudière 
  • Lévis 
  • Charlesbourg 
  • Jean-Lesage
  • Jean-Talon
  • Montmorency 
  • Taschereau 
  • Vanier-Les Rivières


Regardons l'évolution de chaque parti depuis l'élection de 2008. Commençons avec la CAQ (et l'ADQ en 2008):


[*Le PLQ a remporté Chauveau lors d'une élection partielle en 2015 après le départ de M. Gérard Deltell. Les élections partielles ne sont pas indiquées dans ces graphiques.]

En 2008, l'Action démocratique du Québec a perdu plus de 600 000 votes par rapport à l'élection de 2007 et est passée de 41 sièges à seulement 7. Le vote populaire de l'ADQ a chuté dramatiquement de 30,8% à 16,4%. Toutefois, la région de la Capitale est restée fidèle à l'ADQ lors de cette désastreuse élection. En effet, l'ADQ a amassé pas moins de 31,6% du vote populaire dans la région, soit presque le double de la moyenne nationale. Quatre des sept derniers sièges adéquistes se trouvaient parmi ces seize circonscriptions.

La fusion avec la CAQ en janvier 2012 a préparé le terrain pour une importante récolte de sièges lors de l'élection suivante. Le 4 septembre 2012, le nouveau parti de François Legault remporte 9 des 16 circonscriptions et 38,9% du vote populaire dans la Capitale (soit près de 12% de plus que sa moyenne nationale).

Ces gains de sièges caquistes dans la région de Québec privent les Libéraux d'une quatrième victoire électorale consécutive.

Parlant des Libéraux, ils performent historiquement bien dans la région. En 2008, Jean Charest et son équipe remportent 10 des 16 circonscriptions en route vers un mandat majoritaire.


Avec 39,3% du vote populaire (2,9% sous leur moyenne nationale), les Libéraux parviennent à reprendre des comtés perdus à l'ADQ en 2007.

Toutefois, en 2012, les Libéraux vont reculer dans chacun des 16 comtés de la région (voir graphique ci-dessus). Avec une maigre récolte de seulement cinq sièges dans Québec et ses environs, le PLQ est chassé du pouvoir. Parmi ces seize circonscriptions, le PLQ perd près de 8% de vote populaire, presque entièrement aux mains de la CAQ.

Néanmoins, l'élection de 2014 voit un retour en force des Libéraux à Québec. Ils obtiennent 39,2% du vote populaire et pas moins de 11 sièges (dont Charlevoix-Côte-de-Beaupré, le comté de la Première Ministre Pauline Marois).

Regardons maintenant la progression du vote péquiste dans la Capitale:


La ville de Québec et ses environs n'ont pas été tendres avec le PQ lors des dernières élections. Ses appuis ont progressivement reculé dans chacun des 16 comtés étudiés dans ce billet. Même dans la circonscription de Taschereau, dernier bastion péquiste à Québec, le PQ n'a obtenu que le tiers du vote populaire en 2014. (La division du vote a toutefois permis à Mme Maltais de conserver son siège à l'Assemblée nationale.)

Le Parti québécois a performé un peu mieux de 2008 à 2012 dans quelques comtés qu'il a perdus, mais, en moyenne, il est passé de 24,6% du vote populaire à 21,2%. En 2014, la chute a été encore plus brutale: le parti est tombé sous la barre des 20% avec seulement 16,9% du vote.

Finalement, jetons un coup d'oeil au vote solidaire:


Québec solidaire a atteint le seuil du 10% dans une même circonscription à seulement trois reprises dans la région de Québec: Taschereau en 2012 et 2014, puis Jean-Lessage en 2014. En moyenne, QS performe sous sa moyenne nationale dans la grande région de Québec, dont plusieurs comtés avec un vote sous la barre des 5%. On peut se douter que plusieurs électeurs solidaires dans Taschereau sont des anciens péquistes (comme c'est le cas à Montréal dans Gouin et Mercier par exemple).

Toutefois, la lente montée de Québec solidaire ne peut pas expliquer la chute du PQ à Québec. QS est passé de seulement 3,3% en 2008 à 5,4% en 2014, soit un gain de 2,1%. Pendant la même, période, le Parti québécois a perdu 7,7% d'appuis.


En conclusion


Nos politiciens ont raison, stratégiquement, d'accorder beaucoup d'importance aux circonscriptions de la région de Québec, car ces dernières sont hautement volatiles - contrairement à celles de Montréal, où seulement trois ou quatre comtés sont en jeu parmi les 27 circonscriptions de l'île.

Cependant, le vote de la région est tout de même stable si on le compare à la moyenne nationale des trois dernières élections. Considérez la figure suivante:


Les Libéraux performent à peine sous leur moyenne nationale (quoique, considérant qu'il s'agit ici d'un vote presque exclusivement francophone, on peut dire que le PLQ est vraiment au-dessus de sa moyenne). L'ADQ jadis et la CAQ en 2012 et 2014 ont performé bien au-delà de leur moyenne nationale.

Et le Parti québécois? Il n'a pas la cote dans la région de la Capitale nationale. Est-ce que Jean-François Lisée pourra réussir là où André Boisclair et Pauline Marois ont contre-performé dans la région? C'est à voir.


En gros, en regardant les chiffres, il n'y a aucun doute que la région de la Capitale nationale pourrait décider du sort du prochain gouvernement. Si le PLQ parvient à s'accrocher à ces nombreux sièges, il sera pratiquement indélogeable.

Toutefois, si la CAQ parvient à remonter la pente à Québec (les derniers sondages nous indiquent qu'ils sont présentement en tête dans la région), elle pourrait priver les Libéraux d'une majorité en 2018 ou même les chasser du pouvoir.

Et à partir de là, tout pourrait arriver.



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