Les appuis à la souveraineté se raffermissent

Un nouveau volet du sondage Pallas Data/Qc125/L’actualité, sur la souveraineté du Québec cette fois-ci, permet de constater que si les indépendantistes sont encore loin du grand soir, leur projet demeure vivant. La montée vertigineuse du Parti québécois (PQ) et la chute de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans les intentions de vote cet automne semblent avoir eu un léger effet sur l’engouement des Québécois pour le projet indépendantiste. Lire cette chronique ici . Philippe J. Fournier est le créateur de Qc125. Il est professeur de physique et d'astronomie au Cégep de Saint-Laurent à Montréal. Pour toute information ou pour une demande d'entrevue médiatique, écrivez à info@Qc125.com . Philippe J. Fournier is the creator of Qc125. He teaches physics and astronomy at Cégep de Saint-Laurent in Montreal. For information or media request, please write to info@Qc125.com .

Scénarios de victoire pour chaque parti

Tel que mentionné dans le billet précédent, selon la projection actuelle, le Parti libéral possède une probabilité de 65,5% de remporter l'élection, le Parti Québécois 30,5% et la CAQ, 0,3%. Étudions les scénarios gagnants pour chacun des partis.

Considérez le graphique suivant. L'axe horizontal est la projection du vote pour le PLQ des 1000 simulations et l'axe vertical, la projection de sièges. Les points rouges représentent les victoires libérales et les noirs, les défaites. La ligne pointillée est la moyenne du vote libéral (32,9%).


Évidemment, il est normal que les points rouges soient concentrés vers la droite de la figure. Si la projection du vote est plus élevée, la projection de siège le sera aussi et les probabilités de gagner l'élection grimpent.

Même au premier coup d'oeil, on peut remarquer à quel point les points rouges nombreux et dispersés. Vous remarquez sans doute que quelques points noirs se trouvent au-delà de la ligne moyenne des 32,9%, mais aussi que de nombreux points rouges se trouvent sous cette limite. Quantifions ce constat.

En excluant les 3,7% des simulations qui aboutissent à des égalités:
  • Le PLQ surperforme son vote (soit >32,9%) dans 487 simulations et « sousperforme » son vote 476 fois.
  • Lorsque le PLQ surperforme son vote (les points à droite de la ligne pointillée), il est quasiment imbattable: il remporte 92,4% des simulations. Dans la projection actuelle, l'avance des Libéraux au vote populaire ne peut certes pas être considérée comme confortable, mais quelques points de plus et le PLQ s'assurerait virtuellement de la victoire.
  • Lorsque le PLQ sousperforme son vote (à gauche de la ligne pointillée), il remporte quand même 43,1% des simulations. Les partis d'opposition pourraient gruger quelques points au PLQ et ce dernier aurait tout de même près de la moitié des chances de gagner.

[*Ajout: je comprends que le verbe « sousperformer » n'est pas un mot reconnu par les dictionnaires de la langue française. Je le reconnais. Cependant, je prends la décision éditioriale de l'utiliser quand même, car 1) surperformer est un verbe reconnu et 2) contre-performer n'est pas le terme que je recherche ici. « Sousperformer » signifie dans ce contexte que le vote d'une simulation est sous la moyenne de l'ensemble des simulations.]

En calculant la moyenne des appuis des trois principaux partis dans les simulations remportées par le PLQ, on observe les variations suivantes:


En moyenne, le PLQ surperforme son vote de 0,8%. Symétriquement, dans ces même simulations, le PQ sousperforme son vote de 0,8%. Le vote de la CAQ demeure, en moyenne, inchangé.

Sans affirmer que le vote caquiste n'affecte pas le résultat final pour le PLQ, les chiffres ici nous disent que le vote caquiste n'a que très peu d'influence. Pour gagner, le PLQ doit arracher une fraction de point au PQ. (Nous verrons dans un prochain billet où le vote CAQ et PLQ se disputent: dans la région de la Capitale.)

Regardons maintenant les scénarios de victoires et de défaites du Parti québécois.


Les points bleus représentent les simulations victorieuses du PQ et les points noirs, les défaites (les simulations qui résultent en une égalité ne sont pas affichées dans ces graphiques). Que remarque-t-on? La vaste majorité des points bleus se trouvent où le PQ surperforme son vote. Seulement quelques points bleus sont tracés de l'autre côté de la ligne pointillée. Ce n'est bien évidemment pas une coïncidence.

Comme c'était le cas au mois de décembre dernier, le PQ se trouve juste devant le seuil de la zone payante - ce graphique ci-dessus le schématise à merveille. Quelques points au-dessus de sa moyenne du vote et le Parti québécois peut espérer former le prochain gouvernement, même s'il perd le vote populaire. Quelques points sous sa moyenne actuelle et le PQ se retrouve à nouveau sur les bancs de l'opposition (et même, dans certains cas, comme 2e groupe d'opposition, derrière la CAQ).

Le PQ surperforme son vote dans 484 simulations et le sousperforme dans 479 autres:

  • Lorsqu'il surperforme son vote, le PQ gagne 60,1% des simulations. Donc, en augmentant de seulement de quelques points, le PQ deviendrait favori pour remporter l'élection, même si cette victoire ne serait pas assurée. 
  • Lorsqu'il sousperforme son vote, le PQ ne gagne que 14 simulations au total, donc 2,9% de ces cas (d'où tous ces petits points noirs vers la gauche du graphique).

Considérons maintenant seulement les scénarios où le PQ est victorieux:


On remarque que les conditions victorieuses pour le PQ sont semblables à celles des Libéraux, mais plus abruptes.

En moyenne, pour l'emporter, le PQ doit augmenter son vote de 1,7% et gruger 1,6% aux Libéraux. Le vote caquiste doit aussi descendre de 0,2%. Ce scénario n'est certainement pas improbable, car toutes ces variations se trouvent à l'intérieur des marges d'erreur, mais il n'y a aucun doute que le PQ ne possède que très peu de marge de manoeuvre dans la projection actuelle. Pour l'emporter, il doit arracher des votes aux Libéraux et s'assurer que le vote caquiste ne grimpe pas.

Jetons maintenant un coup d'oeil aux distributions des victoires et (surtout) des défaites caquistes.


Évidemment, il est normal que ce graphique soit un chemin de petits points noirs. En effet, la CAQ ne gagne que 3 fois sur les 1000 simulations effectuées. Les points colorés de ce graphique se trouvent à l'extrême droite du graphique, soit seulement lorsque la CAQ surperforme son vote à l'extrême limite de la marge d'erreur.

Fait intéressant et peut-être anodin: les simulations qui ont donné des égalités sont toutes survenues lorsque la CAQ surperforme son vote. En effet, je regarde la compilation des chiffres et je remarque que la CAQ surperforme son vote dans 463 simulations et sousperforme dans exactement 500 simulations. Est-ce une coïncidence? Probablement pas, mais je vais devoir me pencher là-dessus. Une explication intuitive et rationnelle ne me vient pas pour l'instant.

Comme la CAQ ne gagne que trois simulations, la moyenne des chiffres de ces scénarios victorieux n'est pas statistiquement solide. Mais tout de même, jetons-y un coup d'oeil:


Pour espérer l'emporter, la CAQ doit augmenter, en moyenne, son vote de 3,4% (ce qui est considérable) et gruger des votes du PQ (en moyenne 1,5%) et du PLQ (en moyenne 1,1%). Évidemment, dans la projection actuelle, ce scénario est hautement improbable.

Voici les probabilités de victoire pour chacun des partis, selon s'ils surperforment ou sousperforment leur vote (selon les moyennes de la projection actuelle).





Il sera intéressant d'étudier le nombre de sièges gagnés en fonction du vote des rivaux. Nous verrons comment les variations du vote sont corrélées: Comment est-ce qu'une chute/montée de 2%-3% d'un parti X affecte un parti Y? Nous y reviendrons dans un prochain billet.

(En réponse à plusieurs messages reçus cette semaine: non, je n'ai pas oublié Québec solidaire. L'analyse de leurs résultats s'en vient sous peu. Ne vous inquiétez pas!)


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