Plus tôt cette semaine, Luc Fortin, ancien ministre libéral de Sherbrooke et maintenant analyste politique pour Cogeco, a commenté les résultats de sondages internes dans trois circonscriptions fédérales québécoises dont il a obtenu les résultats d'une source au Parti conservateur du Canada et ce, lors de sa chronique matinale
avec Louis Lacroix sur les ondes du 98,5fm Montréal.
Quand un parti politique coule volontairement des sondages internes, d'une façon ou d'une autre, nous pouvons évidemment croire que ledit parti le fait parce que « ça fait son affaire ». Cela ne veut pas dire que le sondage est erroné ou carrément faux, mais il faut évidemment se méfier.
Maintenant
je n'ai aucune raison de ne pas faire confiance à M.Fortin à propos de ces sondages (lui qui est d'ailleurs maintenant Président de l'aile québécoise de Recherche Mainstreet), mais je ne pourrai pas les utiliser pour la simple et bonne raison que les données complètes n'ont pas été rendues publiques. Quelle firme a effectué les sondages? Cette firme est-elle crédible? Quelle est la méthodologie? Quel est la taille de l'échantillon? Quelles sont les pondérations géographiques/démographiques? Toutes ces questions sont pour l'instant sans réponse.
Il faut néanmoins noter que, dans les trois circonscriptions étudiées par ces sondages (Berthier-Maskinongé, Longueuil-Saint-Hubert et Jonquière), le Parti conservateur n'est en tête dans aucune d'entre elles. Et les chiffres coulés ne sont pas si différents que ce que le modèle fédéral Qc125 indique déjà.
Tout de même, la méfiance est requise.
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Voici une petite anecdote récente qui fait augmenter son niveau de méfiance.
En juillet dernier, un candidat conservateur (dans une circonscription où le PCC est loin d'être favori), a commencé à commenter et échanger avec des lecteurs de la version anglophone de ce site (338Canada) sur Facebook. En utilisant, sa réelle identité (avec photos de famille et tout), il affirmait être en possession de sondages internes indiquant que les Libéraux et le Bloc étaient en forte difficulté au Québec et que les maisons de sondages professionnelles ne publiaient pas les bons chiffres.
Je bloque systématiquement sur les pages FB de Qc125 et 338Canada tous ceux et celles qui propagent de la désinformation volontaire:
The Rebel ou des vidéos YouTube « d'influenceurs » bidons à la Faith Goldy, etc. Alors, évidemment, je ne peux pas permettre que quelqu'un vienne publier des chiffres de sondages que je ne puisse pas moi-même confirmer. Quand je l'ai interpellé et lui ai demandé des détails sur les chiffres qu'il avançait, il répéta que c'était des chiffres internes du PCC.
« Mais qui a effectué les sondages? » ai-je demandé.
Sa réponse, paraphrasée, était: « Ce sont nos bénévoles qui font des téléphones. Mais ils sont très professionnels! On veut avoir l'heure juste. Les sondages
mainstream ne disent pas les vrais chiffres. »
Après quelques échanges de la sorte, je lui ai dit que je ne pouvais pas permettre ces genres de chiffres sur la page. Il est resté courtois (et moi aussi). Et ça s'est terminé là.
Des candidats vont parfois tenter de couler des chiffres bidons pour essayer de déstabiliser leurs adversaires. Personnellement, je ne crois pas que ça soit une stratégie bien efficace, mais en politique comme dans les sports, certains croient en une mentalité à la «
Whatever it takes ».
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Vous vous souvenez peut-être de l'élection partielle dans Burnaby-Sud en février dernier, celle qui a permis à Jagmeet de se faire (finalement) élire à la Chambre des Communes? La candidate du Parti Populaire de Maxime Bernier avait tweeté ce « sondage » quelques jours à peine avant l'élection:
Laura Lynn Tyler Thompson affirmait dans ce « sondage » qu'elle était en tête du peloton - elle a terminé au quatrième rang dans l'élection quelques jours plus tard.
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Lors que la dernière campagne québécoise, la palme de malhonnêteté revient à la candidate caquiste Chantal Rouleau, maintenant députée de Pointe-aux-Trembles et Ministre responsable de la métropole. Vers la fin de la campagne, Mme Rouleau avait publié sur les médias sociaux l'image suivante:
De quoi s'agit-il? C'est un graphique Qc125 d'un sondage québécois de la firme Ipsos, indiquant une presque égalité entre la CAQ et le PLQ au Québec, le PQ en troisième place avec 18% et QS à 16%. Ces chiffres étaient des intentions de vote nationales! Mais l'équipe de Mme Rouleau a puisé cette image du blogue Qc125 et a ensuite placé les photos des candidats du comté de Pointe-aux-Trembles à la gauche des logos - pour faire croire à ses électeurs que le PQ n'était pas compétitif?
De la malhonnêté, pur et simple.
Malheureusement, le candidat péquiste Jean-Martin Aussant est ensuite tombé dans le piège et a décidé de couler ses propres chiffres internes: un soi-disant sondage de Repère Communication (un des sondeurs internes du Parti québécois) montrant que M.Aussant avait une avance de 3,5 points devant Chantal Rouleau. J'ai demandé le rapport du sondage, je n'ai jamais reçu de réponse.
(Mme Rouleau a remporté l'élection dans Pointe-aux-Trembles par plus de sept points devant M.Aussant.)
D'autres « sondages » de Repère Communication avait aussi été coulés dans le Journal de Québec tôt dans la campagne - ils indiquaient que M.Lisée détenait une avance confortable dans Rosemont (il a perdu) et que Mme Hivon avait des appuis de 60% des électeurs de Joliette. Quand j'ai demandé le rapport du sondage à la journaliste du JdQ, on m'a répondu « je ne les ai pas, c'est juste des chiffres qui proviennent du PQ. »
Incroyable.
Je n'utiliserai jamais des chiffres que je ne puisse pas vérifier à la source: le rapport doit être rendu public, les pondérations doivent être indiquées et la firme doit être crédible.
Faire des sondages scientifiques aujourd'hui demande des infrastructures et des bases de données d'envergure. Les Léger, Ipsos et autres de ce monde ne sont pas des petites organisations avec des bénévoles qui font des téléphones.
Les sondages de qualité existent encore, tout comme les sources d'informations de qualité. Mais elles baignent aujourd'hui dans un océan de mésinformation volontaire construit de toute pièce pour confirmer les biais et préjugés de chacun. Méfiez-vous.
Et ne partagez pas des sources bidons sur les médias sociaux, sinon vous devenez complices.
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Philippe J. Fournier est le créateur de Qc125. Il est professeur de physique et d'astronomie au Cégep de Saint-Laurent à Montréal. Pour toute information ou pour une demande d'entrevue médiatique, écrivez à
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Philippe J. Fournier is the creator of Qc125. He teaches physics and astronomy at Cégep de Saint-Laurent in Montreal. For information or media request, please write to info@Qc125.com.
