Les appuis à la souveraineté se raffermissent

Un nouveau volet du sondage Pallas Data/Qc125/L’actualité, sur la souveraineté du Québec cette fois-ci, permet de constater que si les indépendantistes sont encore loin du grand soir, leur projet demeure vivant. La montée vertigineuse du Parti québécois (PQ) et la chute de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans les intentions de vote cet automne semblent avoir eu un léger effet sur l’engouement des Québécois pour le projet indépendantiste. Lire cette chronique ici . Philippe J. Fournier est le créateur de Qc125. Il est professeur de physique et d'astronomie au Cégep de Saint-Laurent à Montréal. Pour toute information ou pour une demande d'entrevue médiatique, écrivez à info@Qc125.com . Philippe J. Fournier is the creator of Qc125. He teaches physics and astronomy at Cégep de Saint-Laurent in Montreal. For information or media request, please write to info@Qc125.com .

Les zones payantes du PLQ, de la CAQ et du PQ

Comme nous l'avons appris au cours des billets précédents, dans les intervalles de vote populaire de la dernière projection, les totaux de sièges pour le PLQ, la CAQ et le PQ sont hautement volatils. Entre les pires scénarios (voir billet sur les cauchemars) et les simulations les plus optimistes (voir billet), il y a un énorme écart - par exemple, le PQ et la CAQ pourrait être le deuxième parti d'opposition... ou même prendre le pouvoir.

Au cours du billet d'aujourd'hui, nous allons diviser le vote populaire des trois principaux partis en tranches de 1% centrées sur le vote moyen de la dernière projection Qc125:

PLQ 32,0%
CAQ 26,8%
PQ 24,1%

L'objectif de cet exercice est d'identifier, dans les intervalles actuels, où se trouvent les zones payantes de chaque parti.

Les zones payantes sont définies par une forte augmentation de la projection de sièges sur une plage de vote populaire relativement restreinte. En d'autres termes, elles se trouvent où la pente de la courbe « sièges vs vote » est la plus abrupte.

Considérez le schéma suivant:


Le schéma ci-dessus illustre ce qu'est la zone payante dans notre système uninominal à un tour. Évidemment, la courbe d'un parti peut avoir plus d'une zone payante, comme nous allons le voir plus loin dans ce billet.

Déceler le niveau des zones payantes pour chaque parti aide à répondre à ces questions:

« Quelle fraction du vote populaire un parti doit-il atteindre pour faire le plein de circonscriptions et ainsi augmenter ses chances de prendre le pouvoir?

« À partir de quel soutient populaire est-ce un parti en danger? »

Un parti qui se trouve dans sa zone payante gagne beaucoup de sièges si son support grimpe, mais en perd tout autant si son support baisse. Des exemples récents nous viennent en tête, comme l'ADQ de 2008. Ce parti n'a remporté que 7 sièges malgré qu'il ait amassé 16,4% du vote populaire. Clairement, l'ADQ de 2008 était sous sa zone payante. En 2007, avec un peu moins du double du vote populaire, l'ADQ avait remporté 41 sièges - soit presque six fois plus qu'en 2008!


Voici les résultats des élections générales post référendaires (1998-2014):



La fonction « sièges vs vote » est-elle linéaire? Bien sûr que non. C'est évidemment approximatif, mais nous pouvons tracer la zone payante suivante:




Explorons les zones payantes de chaque parti avec les données de la dernière projection Qc125 (21 mai 2017).


La zone payante libérale


Dans les pires scénarios libéraux, le PLQ récolte tout de même une trentaine de sièges. Comme nous l'avons exploré dans le billet des cauchemars, le grand favori d'une importance sousperformance libérale serait la CAQ qui prendrait le pouvoir avec un gouvernement minoritaire.

Toutefois, comme nous pouvons le remarquer dans la figure ci-dessous, le PLQ atteint une zone payante importante même s'il sousperforme son vote de quelque points.


En augmentant son vote populaire moyen de 29% à 31%, le PLQ remporte en moyenne douze sièges additionnels et surpasse le total de la CAQ aux alentours de 31%.

Avec son vote populaire moyen de 32%, le PLQ est  un faible favori pour remporter un gouvernement minoritaire.

Sauf que dès qu'il surperforme son vote, le PLQ creuse son avance sur ses rivaux et devient quasiment imbattable, même si la probabilité d'un gouvernement majoritaire demeure faible (0,9% au total et 1,8% lorsque le PLQ surperforme son vote).


La zone payante caquiste


La Coalition Avenir Québec, entre ses pires et meilleurs scénarios, peut littéralement doubler son total de sièges tellement la projection est volatile. Dans ses pires simulations, la CAQ termine (encore) troisième derrière le PLQ et le PQ, avec le PLQ loin devant.

À 2% sous son vote moyen de 26,8%, la CAQ entre dans une première zone payante qui lui permet de supplanter le PQ en nombre de sièges et s'installer confortablement comme opposition officielle.

Au cours de cette première zone payante, la CAQ passe d'une moyenne de 30 à 45 sièges, soit un gain de net de 15 sièges (huit aux dépens du PQ et sept du PLQ).

Avec son vote moyen de 26,8%, la CAQ formerait une opposition forte à un gouvernement libéral minoritaire faible.


Une deuxième zone payante pour la CAQ a lieu lorsqu'elle surperforme son vote de 1% à 3%. Au cours de cet intervalle, la CAQ remporte neuf sièges additionnels et dépasse le PLQ en tête des projections.

Les scénarios extrêmes sont bien sûr peu probables, mais cette projection nous indique que la CAQ pourrait prendre le pouvoir avec aussi peu que 29% du vote populaire.


La zone payante péquiste


Pour la formation souverainiste, les pires scénarios sont extrêmement inquiétants, c'est le moins qu'on puisse dire. Avec une récolte de moins de 20 sièges dans 4,6% de la totalité des simulations, le PQ pourrait possiblement imploser s'il devait sousperformer sa moyenne actuelle de 24,1%.

Des pires scénarios jusqu'à sa moyenne actuelle, le PQ ne gagne qu'un maigre huit sièges additionnels, principalement aux dépens du PLQ (qui serait en tête d'ailleurs). La CAQ demeure confortablement à l'opposition officielle.



Mais en surperformant par plus de 1% sa moyenne, le PQ peut faire des gains importants. En effet, entre un vote populaire de 1% à 3% au-dessus de sa moyenne, le PQ remporte pas moins de 15 sièges et peut même alors espérer former un gouvernement minoritaire.

Comme le vote péquiste est, encore une fois, le vote le plus efficace, le PQ possède la zone payante qui le mène au pouvoir la plus basse des trois grands partis. Effectivement, selon les données de la projection, le PQ remporte 3,7% des simulations sans jamais gagner le vote populaire.


En conclusion



Bref, nous avons ici une illustration claire pourquoi les projections de sièges sont si volatiles: par rapport à leur vote moyen respectif:

  • Le PLQ est à peine 1% devant sa zone payante. S'il devait perdre quelques plumes supplémentaires, le PLQ risque de non seulement perdre sa majorité, mais se faire déloger du pouvoir.
  • La CAQ et le PQ sont tous les deux à 1% à 2% derrière leur zone payante qui les mène au pouvoir. Quelques points supplémentaires et chacun de ces partis peut espérer prendre les rênes de gouvernement l'an prochain.

Considérez la mosaïque suivante. L'axe vertical est le vote populaire libéral et l'axe horizontal, le vote populaire caquiste:



Les points rouges sont les victoires libérales, les points turquoises les victoires caquistes et les points bleus, les victoires péquistes. Nous pouvons voir que si les Libéraux surperforment (au-dessus de la ligne de 32,0%), ils remportent presque la totalité des simulations, soit 95,6% pour être précis.

Dans le quadrant inférieur droit (sousperformance libérale et surperformance caquiste), la vaste majorité des points sont turquoises. En effet, en plus d'espérer que le PQ demeure à de bas nivaux, la CAQ doit compter sur la combinaison de ces facteurs pour l'emporter.

Et les points bleus? Ils sont rares, mais ils se trouvent presque exclusivement dans le quadrant inférieur gauche, où le PLQ et la CAQ sousperforment lors des mêmes simulations.



Je pense que nous sommes prêts pour de nouveaux sondages, non?

Bonne fin de semaine à tous et toutes!!


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